mercredi 18 avril 2007

N°7-(J+28) "LE CARNET DU PELERIN"- LA JOURNEE TYPE




Le BLOG: Nous commençons à bien te connaître depuis quelques semaines que nous voyageons avec toi, et nous voudrions partager une journée type. Peux-tu nous parler de ton organisation au quotidien et du déroulement d'une journée?
Alain le Pèlerin: Les séquences que je vais évoquer ne sont pas immuables dans le temps. Néanmoins, un certain rythme implique une discipline, donc des rituels que je vais tenter de vous faire partager en toute "intimité" et simplicité.
  • 6h Généralement c'est vers cette heure là que les jambes du Pèlerin commencent à fourmiller. Le réveil, 1 fois sur 6 ou 7 se fait en gîte et le plus souvent en sac de couchage sous la tente. L'incertitude du paysage matinal me hante un peu. C'est comme pour les footballeurs au centre du terrain avant un match, en pleine concentration, recueillement. En prière pour espérer que la chance sera de leur côté. Pour moi, c'est semblable. Mains jointes, j'espère une météo favorable, pas de mauvaise surprise autour de ma tente, et qu'une fois dépliée ma "carcasse" réponde bien à mes injonctions de mouvements et d'endurance. Les ablutions matinales relèvent plus de la toilette d'un chat paresseux, que du prélassement en sauna. C'est la Mère Nature qui me guide. La proximité d'un point d'eau est primordiale (ruisseau, mare, étang, fontaine, lavoir, camping...) mais quelquefois l'abreuvoir de bovins ou d'ovins au coin d'un pré fait l'affaire pour y voir plus clair! et retrouver du tonus.

  • 7h C'est le démarrage du FIL ROUGE de toute les journées de pèlerinage: la marche. D'un bon pied & d'un rythme soutenu, jusqu'à 13h. J'évite les villes et choisis plutôt les bourgs pour le ravitaillement. La matinée est propice à l'effort, au dépassement de soi, et constitue une période de pleine lucidité où on teste ses capacités physiques, morales et intellectuelles. C'est également l'occasion de créer des liens.

  • 13h Déjeuner le plus souvent avec une préparation rapide (très souvent froide) ou des sandwichs. L'arrêt restau. et menu avec apéritif, entrée, plat, fromage, dessert et café chaud, n'est pas à mon programme de Pèlerin. Le voeu de "pauvreté" avec en moyenne, 10€ par jour est un engagement personnel qui m'importe.

  • 15h Après une pause/sieste/relax, reprise du parcours pour 5 à 10 kms selon météo, tableau de marche ou nécessité de trouver un point de ravitaillement.

  • 18h Recherche d'un "Nid" pour passer soirée et nuit sous ma tente. Généralement, un espace en infractuosité (comme sur photo à gauche), ou une grange, ni trop près de la route, à cause du bruit et pour éviter d'attirer l'attention ou les chiens, ni trop loin pour accéder assez facilement à un axe pour demander de l'aide, du secours en cas de besoin. Je vous expliquerai une autre fois ce choix de site en plein air, plutôt qu'au gîte. C'est également le temps des travaux domestiques (photo à droite). Vous comprendrez mieux alors ma prédilection pour les abords de canaux afin de planter mon intérieur.

  • 21h Coucher. Même si les soirées sont belles, mon état de fatigue, et mon besoin de récupération me font vite quitter ma lampe frontale. Elle est utile pour rédiger quelques notes avant de regarder dans le rétroviseur de mes souvenirs "remonter au grenier de mes ancêtres" comme on a l'habitude de dire, et de plonger dans le sommeil profond. Je peux vous assurer que radio et journaux ne me sont pas nécessaires. Je consulte à l'occasion de commissions, les titres de la presse dans les kiosques. Pour les soirées plus difficiles où le sommeil est long à venir, c'est la bousculade dans la tête. Tout y passe, le monde, la société, ses joies, ses problèmes, le sens de la vie, les amis, la famille, et quelquefois il faut bien l'avouer le doute, la peur, l'insatisfaction ou au contraire "la pêche", la joie, l'enthousiasme..etc. Cela dépend souvent des rencontres faites sur le chemin. L'effet contact humain, discussion, échange donne encore plus de sens à ma démarche.

Le BLOG: Nous voyons au travers de tes propos que la réussite passe par une hygiène de vie bien dosée. Qu'en est-t-il exactement de ton organisation matérielle?

Alain le Pèlerin: Avant le départ, la préparation du sac est une phase primordiale. Le sac constitue le bât qui pèse, non seulement sur les épaules, mais aussi sur les jambes en tirant sur les cuisses. Alors il ne faut pas céder à la tentation du confort et de la gourmandise. Il faut faire des choix. Et comme faire des choix c'est renoncer, on se concentre sur l'ESSENTIEL, l'INDISPENSABLE pour se limiter à un poids entre les 15,235 kgs et 17,978 kgs.(Non je plaisante je n'ai pas ce niveau de précision). C'est vite arrivé quand il faut penser à quelques vêtements de rechange, le nécessaire de toilette, les trousses à couture et d'urgence sans oublier un peu de ravitaillement, tente, matelas gonflable, duvet et babouches pour la relaxation. Le couteau, lui, est toujours dans la poche. Quant aux moyens de communication, je ne suis pas un adepte inconditionnel du portable mais sa présence rassure les miens et me permet d'avoir le 112 au bout des doigts en cas de défaillance ou incident majeur de santé.

Le BLOG: Si on comprend bien tu es très occupé. A quel moment fais-tu un peu de tourisme?
Alain le Pèlerin: En fait j'en fais en permanence. Je saisis toute opportunité pour visiter, églises, chapelles, calvaires, ces lieux de recueillement et de silence balisent l'itinéraire du Pèlerin et sont bien répertoriés sur les guides. Il ne faut pas rater une occasion d'admirer ces sites souvent très travaillés architecturalement vers lesquels convergent les "jacquets". C'est l'occasion de se retrouver, de se poser et quelquefois de repartir à plusieurs pour effectuer un bout de chemin ensemble. On est ensemble dans cette ambiance mystique insoupçonnée, dans un autre monde, une toute autre dimension, pour le néophyte de pèlerinage. Ce sont généralement de BONS moments, voire très bons. Surtout que, lorsque l'on fait 5 ou 6 heures de chemin avec quelqu'un, c'est l'équivalent de plusieurs années de vie avec lui.


Le BLOG: Maintenant que tu es dans le Sud ouest, qu'est-ce qui change autour de toi? Alain le Pèlerin:

20 ème jour

A la REOLE, j'ai passé la soirée dans une famille de vignerons, un peu comme chez moi, mais comme ils avaient des amis ce n'est pas toujours évident de ne pas se sentir gênant. En quittant LA REOLE, c'est le domaine de l'eau, le long du canal avec peupliers et osiers. A BAZAS, au sud de LANGON en Gironde, on sent déjà les landes. La spécialité d'élevage est le boeuf gras de BAZAS . La réflexion est de mise dans ce paysage monotone. Si en quelques jours, je considère qu'on ne peut pas avoir l'esprit "Pèlerin", après 3 semaines et dans ce paysage, le doute n'a plus place. En rentrant dans CAPTIEUX , porte de la haute Lande, c'est rues pavées et rues pavées. C'est aussi l'avant goût Espagnol avec taureaux et corridas. Ce sont des édifices de pierres jaunes truffées de coquilles fossilisées. Sur le trajet c'est encore vestiges de sanctuaires et hôpitaux. Le trajet se fait beaucoup sur le bitume. C'est pas terrible. Je rencontre des "soixantehuitards" avec barbe blanche et queue de cheval. Ces babacool font une démonstration de vieilles décapotables.

A ROQUEFORT, je retrouve un Pèlerin à l'église, et quand deux Pèlerins se rencontrent, devinez ce qu'ils racontent?......(Je voulais vous la faire 1 fois...)

Puis c'est MONT DE MARSAN, avec ses élevages de canards pour le renommé foie gras. Dans la forêt de pins tout est silence, brisé harmonieusement par le cri des geais. Partout on respire l'odeur de la résine et des sous bois.

Le BLOG: Mauriac a dit "La Lande est la servante de l'esprit". Qu'en penses-tu? Alain le Pèlerin: La platitude des lieux laisse le temps de réfléchir, de méditer, d'autant qu'une borne à RETJONS annonce SANTIAGO à 1000kms.

21 ème Jour:

A SAINT SEVER, région qui fait plus penser au Béarn qu'aux Landes avec ses champs de maïs, ses pâturages arrosés par l'Adour, je découvre l'abbatiale la plus importante du Sud Ouest. On sent l'influence de la chasse avec les palombières. Je séjourne dans le cloître des Jacobins. Il fait très chaud. Je suis seul dans ce cloître avec 32 lits disponibles. La vue est unique sur les arcades et sur la cour, et tout ça pour moi tout seul....c'est un peu dommage. C'est calme et reposant.

22 ème Jour:

ORTHEZ,ses champs de maïs à perte de vue, et ses toits couverts de tuiles rousses, annonce le Béarn avec des chemins plus pentus. Ici il n'y a plus de vaches, par contre les chiens aboient sur mon passage quand mon bourdon frappe le bitume. A moins que ce soit à la vue de ma barbe. Elle a bien pris 1 cm depuis le départ. Le chant des coucous et des grenouilles m'accompagnent. Je m'arrête pour la nuit dans un gîte d'étape, car il y a un lave linge. Je suis avec deux Allemands, au demeurant charmants, mais question dialogue, je ne suis pas à la hauteur. Mon handicap bilingue est insurmontable.

Le sac est lourd, très lourd même par moments, et je commence à avoir mal à la plante des pieds. Au gîte je me fais réchauffer une soupe toute prête. C'est bien de manger chaud.

23 ème Jour:

Hier soir, je me suis entretenu avec une Canadienne un peu perdue et lui ai donné quelques conseils. Je suis parti à 6 heures du matin. En forme, j'ai tendance à marcher un peu vite. "Alain il faut t'économiser car l'arrivée est encore loin!!!" J'apprécie les signes amicaux des riverains qui me saluent.

A 208 mètres d'altitude, SAUVETERRE de BEARN, son église dédiée à Marie Madeleine, et le Gave qui s'écoule. Les villages sont d'une grande propreté et dotés d'équipements qui pourraient nous rendre jaloux.

OSTABAT c'est l'entrée du Pays Basque, le département 64, avec les couleurs traditionnelles des volets rouge sang ou vert foncé. A ST PALAIS existe un musée du passé jacquaire. Je perçois la chaîne des Pyrénées. Ici, on retrouve la voie "Le Puy en Velay/St Jacques". Au foyer rural où je m'arrête, les anciens m'invitent à jouer aux cartes. Il faut se faire violence pour résister à la tentation. Pourvu qu'à mon retour, je sache encore jouer au tarot et battre les copains!! Il pleut et je suis obligé de me réfugier dans un hangar, où je passe la nuit.

24 ème Jour:

En repartant ce matin au petit jour, je rencontre l'amie d'un Pèlerin rencontré il y a 2 ans, et qui habite Sens. Comme elle est en voiture suiveuse, c'est l'occasion pour moi de me débarrasser de ma tente que je lui confie, car elle ne me sera pas de grande utilité en Espagne. En plus ça libère un peu la charge sur les épaules.

ST JEAN PIED DE PORT est le coeur du PAYS BASQUE. L'activité pastorale avec les troupeaux de brebis est partout. C'est le point de convergence de tous les Jacquets qui se retrouvent dans la rue d'Espagne. C'est magique comme paysage avec le PONT sur la Nive, la citadelle, les anciennes maisons Navarraises. L'hospitalité est également partout. Les Pèlerins comme les touristes font partie du paysage. Le drapeau Basque (photo du centre) flotte à de nombreuses fenêtres. C'est un signe d'appartenance très fort ici.


En gîte, l'hospitalier m'informe que le col de RONCEVAUX est fermé à cause de la neige, et qu'il est conseillé de prendre la route. Dommage, car la perspective de crapahuter dans la montagne m'exaltait. Je reste prudent, d'autant qu'un Anglais s'est perdu et a été retrouvé mort.

Lors de notre prochaine rencontre, je vous parle des gîtes d'étapes, des Hôtels Dieu, des hospitaliers, et de mon passage en Espagne..

NB: Si vous voulez communiquer avec Alain le Pèlerin CLIQUEZ ICI. (Le PC suiveur assure le relais)

1 commentaire:

Anonyme a dit…

C'est captivant. Chaque semaine on attend la suite. Bravo au Pèlerin et à son staff suiveur.

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